#111

Jul 19 2013

D’abord, il y a la route… Sur l’aire d’autoroute, je tombe sur des Italiens qui ne parlent pas un mot de français, sur un type au comptoir qui me sert mon café, enjoué comme un jeune enfant qui découvre un nouveau jouet ; il est manifestement heureux de vivre et d’être là. Des éoliennes qui ne tournent pas, et du brouillard depuis Bayeux jusqu’à mon arrivée en Bretagne. La route est belle, plus agréable que l’autoroute A10. Arrivé à Précey, petite ville assise au bord de la route, je me dis que la Bretagne commence ici avec ses maisons de granit, alors que le Couesnon n’est pas encore dépassé. Je traverse pour la première fois la belle Rance, majestueuse, aux abord verdoyants. Entre Villedieu-les-Poêles et Avranches, de superbes ponts métalliques, des ouvrages dignes enjambent encore les vallées.

J’ai percé Lannion, traversé sa périphérie pleine de grandes surfaces de plus en plus nombreuses, pour venir ma ficher directement sur la place centrale qui a été complètement refaite depuis la dernière fois que je suis venu. Il me semble qu’en décembre 2011, quand je suis venu enterrer ma grand-mère, tout ceci n’existait pas encore. La ville m’a semblé déserte, sans vie, sur une place où les petits commerces semblent fermer les uns après les autres. Signe des temps ? Une certaine tristesse supplante le désir.
J’entre dans le magasin de Sophie qui ne me reconnait pas au premier abord, me dit bonjour et retourne à ses occupations. Je suis content de la revoir, nous ne nous sommes pas vus depuis deux ans, son regard et sa voix sont toujours aussi doux ; elle m’inspire à chaque fois une incroyable sérénité. La dernière fois, elle m’a invité à dîner à Kerenoc et j’ai fait la connaissance de sa petite famille qui vit dans une belle maison au bord d’une petite baie, face au soleil qui plonge dans l’eau. Son magasin est une antre magique, pleine de recoins secrets, de boîtes mystérieuses qu’on n’ose à peine ouvrir, de récipients à thé, de théières aux formes épurées, de boîtes en métal pleines à ras-bord de thés exceptionnels venant du monde entier, des raretés, des Pu Er mythiques enfermés dans des boîtes qu’on croirait sorties d’un bazar de Saïgon et qui pourraient, si on n’y prenait garde, renfermer quelque serpent venimeux. Cette fois-ci elle m’a sorti un thé confidentiel, un thé violet du Yunnan dont elle sait me raconter l’histoire, un thé à grandes et belles feuilles, des jeunes pousses odorantes qui produiront une décoction subtile ; un thé de campagne, comme elle dit.
Malheureusement, elle doit partir pour honorer une invitation. Je repars de là avec mon thé, mes boules d’osmanthe, un thermos en verre (l’autre a explosé grâce à un chat de ma connaissance) et deux énormes pots à thé tournés et émaillés de Cécile Poisson, des pièces vraiment exceptionnelles à la texture très étranges. Je ne sais pas si je reverrai Sophie cette année.
En partant de Lannion, je décide de pousser jusqu’à Tréguier ; il est un peu tard et j’espère quand-même pouvoir trouver une pâtisserie à me mettre sous la dent. Par chance, c’est encore ouvert et je tombe des nues que Madame Adam me reconnaisse à chaque fois que je viens. Elle est encore très belle, joliment bronzée. Je suis peut-être encore plus étonné de voir qu’elle et son mari son toujours ensemble…
Le parvis a bien changé. Il a été pavé, proprement, c’est assez joli. Je ne suis pas resté suffisamment longtemps pour bien respirer l’air de la ville, mais il faisait beau et chaud. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas fait aussi beau ici. Je pense que ça doit remonter à 2003, l’année de la canicule.

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