Si un jour je gagne au loto, si je peux tout faire parce que j’ai tout, je promets de partir en Syrie pour aller faire la guerre, rendre les Syriens et les chefs d’œuvre de l’architecture de l’Islam à la liberté, je pourrais arriver en Iran et virer les chefs de guerre pour faire de ce grand peuple un peuple libre ; j’irai vivre dans le désert et cavaler sur un cheval avec les nomades, dormir sous une tente de tissu rapiécée mille fois, là où l’argent n’a pas sa vraie valeur, pour justement dévaloriser la fonction symbolique de l’argent… Je suis toujours aussi idéaliste.
Mais voilà, on est choisi, on est élu par le Dieu Loto…

Tarmac de Nevşehir, août 2012
Si un jour, je suis élu, alors je donnerai tout, ou presque tout, je garderai le strict nécessaire pour ne pas que ma banquière me casse les bonbons tous les mois en me disant que je dépasse le nombre de jours de découvert autorisés. Je pourrais passer tout mon temps à voyager, auquel cas je n’aurais plus besoin de passer tout ce temps à classer mes photos de voyage, à les retoucher, à écrire, à me souvenir…puisque je pourrais faire ça en direct. Ce serait tellement bien. Romuald autour du monde. Finalement, ça ferait gagner du temps à tout le monde…
Plus je lis, et moins je sais. En tout, moins j’ai l’impression de savoir.
La semaine a filé comme une longue déprime agaçante, me paralysant les membres et l’esprit ; l’impression d’avoir des fils de guimauve au bout des doigts, collants, dont je n’arrive pas à me débarrasser. Incapable d’entamer quoi que ce soit et certain de n’avoir envie de rien.J’ai passé ma soirée d’hier devant la télé, ce qui ne m’arrive jamais et pour enrayer la machine, je suis allé me coucher à une heure de poule pour terminer Typhon de Joseph Conrad qui traînait depuis plusieurs jours.
Si le soleil est de la partie, j’aimerais pouvoir tirer profit de cette dernière journée de fac en me sentant un peu plus vivant. Il paraîtrait que ce n’est qu’une question de volonté.
Je viens de lire quelque chose sur le Musée du Caire. Et il y a peu de temps, j’ai trouvé quelque chose sur le Musée des Arts Islamiques d’Istanbul. En fait, je me dit que c’est quand même dommage de prendre du temps de voyage pour visiter des musées à l’autre bout du monde, même si je suis allé au Musée du Caire et que je compte bien aller à Topkapı la prochaine fois que je vais à Istanbul. Mais disons simplement que ce n’est pas la priorité. Je pense qu’on peut se permettre d’aller au musée une fois qu’on a pris la température de la rue et qu’on a vu des habitants… C’est tout bête, mais descendre dans la rue et regarder les gens passer, il n’y a que comme ça qu’on s’imprègne de l’essence d’une ville, pas en allant voir les vitrines aseptisées des musées sous haute surveillance.
Oui, je sais, c’est moi qui dit ça… N’allez pas au musée… On croit rêver…
Aujourd’hui, je n’étais pas là. Pas là dans ma tête, pas là dans ma place.
Absent, évaporé, visiblement vidé de toute présence.
Do not disturb…