Au fur et à mesure que les jours passent, je range mes livres, je les ordonne à nouveau pour rendre l’ensemble plus cohérent à mes yeux. J’ai dans l’idée un jour de prendre en photo tous mes rayonnages de livres et de n’en faire qu’une seule photo en les mettant bout à bout.

J’ai aussi dans l’idée de reprendre mes moleskine composés. Quand je pense que j’ai donné un de mes moleskine à quelqu’un dont je n’ai plus de nouvelles, je m’en mords les doigts. Mais tant pis, au moins m’en reste-t-il des photos. C’est le hasard des choses, ce grand maître du voyage…
Et puis aussi un projet de compilation encore un peu abstrait, mais je vais y travailler.
Une certaine mélancolie s’empare de moi. Voici presque un mois que je suis revenu de Turquie et je ne sais comment dire ce qui s’est passé là-bas. J’en ressens une certaine tristesse, de n’avoir pas pu découvrir Istanbul avec autant de plaisir que la première fois.
Orhan Pamuk écrit dans son livre Istanbul que s’il y a bien un sentiment qui caractérise sa ville, c’est la tristesse et le sentiment de perte que les rues et l’ambiance générale engendrent, le hüzün. Peut-être ai-je été attrapé par le hüzün.

J’ai l’impression que la ville m’a échappé et que ces derniers jours avec mes amis m’ont un peu fait perdre le sens de ce que je cherchais. Le pire de tout, je crois, est que je me suis retrouvé envahi par les touristes français et étrangers que je n’ai pas vus en avril 2012 ; la haute saison n’était pas encore là. Comme j’ai vu Istanbul en avril puis en août et qu’il n’y avait pas grand monde, je crois que j’ai été déçu de voir ce fatras indescriptible, des queues immenses devant Aya Sofia, les rues attenantes au Grand Bazar gonflées artificiellement. C’est la dernière fois que je pars à cette période. Un peu plus tôt ou alors au mois d’août, mais plus jamais en mai. Et puis il me reste tellement de choses à voir… tellement de photos à prendre, tellement de lieu à fouiner, de places à fouir…
Pour l’instant, entre deux prises de tête sur mon mémoire, je suis en train de préparer mes vacances du mois d’août, ça me changera les idées.
Istanbul est en ébullition. La ville chauffe et ce que je prenais pour une aberration — Erdoğan au pouvoir depuis 9 ans, un islamiste modéré, conservateur libéral — est en train de faire du bruit. Les jeunes commencent à penser que c’est impossible que la majorité de la population soutienne encore cet homme autoritaire. Taksim chauffe. Lorsque j’étais à Istanbul en mai dernier, j’ai vu les premiers rassemblements à Beyoğlu, auxquels j’ai failli me mêler, avant de me raviser, de peur de me retrouver dans quelque chose qui pouvait très bien m’échapper.
Il y a toutefois peu de chances que les choses changent. La Turquie reste un pays tenu par une main de fer. Une main invisible, mais une main de fer.

Par contre, il faudra dire à Brice Toussaint, que non, la Turquie ne vit pas le printemps arabe… Les Turcs sont Turcs, pas arabes. Et puis les Turcs ont déjà fait leur révolution forcée en 1923.