J’ai commencé hier matin à lire La nuit, d’Elie Wiesel. Je n’aurais pas le temps de terminer avant de partir, mais je ne compte pas l’emmener avec moi. J’ai besoin d’autre chose pour là-bas, une autre charge émotionnelle. Ce matin, je me suis réveillé à 4h00, incapable de rester plus longtemps endormi, flottant dans un demi-sommeil pour finalement venir à penser au boulot.

J’emmènerai avec moi dans mon lucksack : Istanbul d’Orhan Pamuk qui sait si bien dire sa ville et un livre d’histoire aussi. J’hésite encore entre Le jour des barbares : Andrinople, 9 août 378 (d’Alessandro Barbero) et Lépante: La crise de l’Empire ottoman (de Michel Lesure). Ce qui est certain c’est que ça parlera de Turquie. J’ai déjà quelques projets d’excursion : les vallées de Çavuşin (quand j’y pense, j’avais toute une journée pour visiter les trois principales vallées et je n’en ai fait qu’une seule en passant par des chemins pas possibles), Mustafapaşa, retourner à Pancarlı, si j’arrive à retrouver la route cahoteuse de ses petites églises troglodytes, la vallée de Zelme, je retournerai aussi aux sources chaudes de Bayramhacı, peut-être irais-je jusqu’au fantastique Tuz Gölü qui est tout de même un peu loin et dont on ne trouve pas du tout trace dans les guides…
Pour Istanbul, j’ai plein de projets aussi : les îles des Princes (s’il n’y a pas trop de monde parce que hein), certainement le nord ouest de Fatih, Balat, Fener, Ayvansaray (l’ancien quartier des Blachernes et l’église Sainte-Marie), le patriarcat orthodoxe avec l’église Saint-Georges renfermant une superbe iconostase en or, la mosquée Zeyrek Sultan (ancien monastère du Christ Pantocrator). De quoi faire, de quoi rêver, de quoi manger (balık ekmek à Eminönü)…
Tout est prêt, ce soir je rangerai tout bien carré, en n’oubliant pas les cartes (surtout ma très précieuse carte des tombeaux d’Istanbul), les guides, mon Istanbulkart qui me permettra de prendre le tramway.
Je vais là-bas pour m’extraire quelques instants de l’humanité pleurnicharde et auto-centrée qui n’arrive pas à se départir de ses oripeaux du malheur. Je vais là-bas pour récupérer, pour me récupérer et pour me laisser détruire aussi.
Je ne suis plus là.
Plus que trois jours avant le départ. Je me rends compte que ce voyage est en fait assez particulier puisque je pars pour des endroits que je connais déjà. Ce ne sera pas forcément une redite mais l’occasion pour moi de faire d’autres choses, visiter des coins à pied en me perdant un peu, passer du temps sur la place d’un village sous un arbre, sentir l’air, humer, déambuler, revenir, repartir… Je n’ai toujours pas réellement construit de projet pour partir, mais ça va venir. Il faut que je me décide aujourd’hui, car il ne me reste que deux jours en gros.
Il y a un endroit où je veux retourner pour attraper un livre sur les premières églises chrétiennes de la région et que je n’ai pas réussi à retrouver ici. Encore un livre. Le livre est l’avenir du rangement. S’il prend un peu de place, il est tout de même d’une forme suffisamment intelligente pour être calé avec d’autres dans un agencement qui permet de monter des murs, des colonnes, etc. Il est la forme parfaite, qui évite que ce soit le bazar.
J’ai l’impression de laisser un peu le perroquet suédois à l’abandon, mais il va falloir s’y faire. Jusqu’au mois de décembre, je vais réduire le rythme, ma priorité étant ailleurs et je dois avouer que cette année et demie d’université commence à singulièrement m’épuiser l’esprit.

Je pensais avoir le temps d’écrire sur Hiérapolis avant de partir, mais je dois m’y résoudre, je n’aurais pas le temps, et quand je dis que je n’ai pas le temps, c’est que vraiment, je ne peux pas. Il faudra se contenter d’une photo.
J’avais bien l’intention aujourd’hui de faire ma déclaration d’impôts aujourd’hui et j’ai pu le faire en quelques minutes avec mon téléphone. Là, je dois dire que je suis bluffé.
Cet après-midi, je suis allé à Cultura (attiré par la perspective de l’Alhambra 4P) et je suis tombé sur un type très très bizarre, Alain Mayer. Déjà, un type qui fait une séance de dédicace en allant chercher les gens dans les rayons, c’est suspect, mais quand il m’a demandé de lire sa quatrième de couv’, je n’ai rien compris à son histoire et je n’ai pas plus compris ce qu’il m’a expliqué. Un type dérangeant qui ne sentait pas la rose, le genre de personne qu’on aimerait ne pas rencontrer…
Entre deux interstices de temps pendant cette semaine marathon, je me suis permis de craquer et de me faire livrer un nouvel appareil photo. L’autre était très bien mais cette faculté à prendre les poussières dans les lentilles m’énerve. Je me suis donc offert un Panasonic Lumix DMC-LX7. Très belle facture, solide, facile à prendre en main et plus charmant que tout, une ouverture à 1.4, un objectif Leica (c’est difficile de revenir en arrière) et je me suis permis de m’acheter un bel étui en cuir avec une carte 32Go. Ouais.

D’un autre côté, j’ai commandé aussi tous les bouquins dont je vais avoir besoin de pour travailler sur mon article. Deux livres d’Yves Citton, un livre sur les anthropologies buissonnières et le travail social. Il faudra aussi que je lise Mauss, Levi-Strauss et Mircea Eliade. A doses homéopathiques. Les grands manœuvres ont commencé.